Et pourtant, ce à quoi Aminata Montero Samb était destinée était juste sous ses yeux, mais comme une quête initiatique, il lui faudra 20 années pour s’en rendre compte et trouver sa voie.
Une série de questions sur le sens de son combat font le pied de grue dans sa tête, se bousculent et s’entrechoquent lorsqu’elle arpente les rues de Dakar dans l’espoir de trouver de meilleures conditions de vie que celles qu’elle avait laissé pour tracer son destin à six mille lieues de là, il y a deux décennies.
Désillusion et mal être! Désespoir et chagrin! Voilà les seuls mots qui font échos dans sa tête devant le spectacle insoutenable de ce petit mendiant aux pieds nus qui demande sa pitance journalière et celui de cette vieille dame, la soixantaine révolue qui n’espère sa dépense quotidienne qu’avec les maigres ressources de la vente de ses sachets d’eau. Deux fleuves de désillusions qui se jettent dans l’océan de détresse que retrouve cette mère de famille déterminée, mais qui suffiront à lui insuffler un déclic. Aminata Monteiro Samb cache mal sa surprise: » Je suis rentrée dans mon Sénégal natal et je me suis rendue compte que rien n’a changé. Ce que j’avais laissé 20 plutôt s’était empiré. » La culpabilité de s’être expatrié « pour rien », ce sentiment « d’avoir trahi les siens en migrant » il y plusieurs années déjà lui font l’effet d’une grosse claque à la figure.
Un réveil des plus douloureux qui, paradoxalement, sera un nouveau départ pour celle qui refuse désormais la fuite: » Je me suis faite la promesse de ne plus fuir, d’assumer les conséquences de mes actes et d’affronter la réalité. » Après des années à se chercher,
c’est donc un voyage aux sources qui fera briller l’étincelle. Ce qui était censé n’être qu’une bouffée d’air loin du bouillonnement occidental où elle avait fait sa vie, sera la révélation.
Cette cuisinière qui a toujours eu la fibre entrepreneuriale car elle avait son propre restaurant à Nantes, ne cessera dès lors de se demander comment faire pour aider, inverser la tendance et donner aux sénégalais la possibilité de manger, mais pas à n’importe quel prix. Soucieuse de l’environnement et de la santé des personnes, c’est vers l’agriculture biologique que la nantaise d’adoption se tournera. Elle poursuit: « Je devais faire quelque chose pour changer mon pays et aider la population à vivre dans de meilleures conditions.
Après réflexions, la réponse était évidente. Je devais me lancer dans l’agriculture parce qu’un homme qui ne peut pas manger, ne peut rien faire d’autre. Mais attention, pas n’importe quelle agriculture. Une ferme biologique et d’expérimentation parce que oui, je rêve du développement de mon pays, mais pas à n’importe quel prix. » Une audace qui portera ses fruits.